Voici un disque à la fois terriblement indispensable et vain, qui à la fois n’apporte rien de neuf mais que l’on va pouvoir écouter avec un sourire béat du début à la fin. Un énième live de Queen certes, mais qui vient cette fois-ci couronner presque dix ans de carrière pour Adam Lambert aux côtés de ces deux papas Roger et Brian, John Deacon restant toujours inflexiblement fidèle à sa résolution de se tenir en dehors de tout ça.
Et autant le passage au micro de Paul Rodgers avait un sens évident pour tous les connaisseurs, Freddie Mercury vouant un quasi culte à l’ancien chanteur de Free et Bad Company, autant l’arrivée de ce jeune américain sorti d’American Idol avait naturellement de quoi diviser pour rester polis.

Or tournée après tournée ce garçon extraverti mais à la technique vocale impeccable a su s’imposer comme un meneur de scène et un showman de très haut vol. Non il n’est pas Freddie Mercury tout comme chez AC/DC Brian Johnson n’a jamais été Bon Scott mais rendons hommage à Lambert qui déploie toute son énergie pour se hisser à la hauteur du maître. Et le plus souvent ça marche. La démarche n’étant d’ailleurs pas d’effacer l’idole, Adam Lambert n’est pas devenu formellement membre du groupe et l’idée d’incorporer la voix de Freddie à la fin de Love Of My Life témoigne du respect et des regrets qui taraudent encore Taylor et May, si ce n’est la communauté des fans de Queen dans leur ensemble.
Le programme veut offrir un regard global sur les concerts avec Adam Lambert depuis 2014 jusqu’au monumental Rhapsody Tour de 2019 puis un peu 2020. 20 titres, 1h20 durant laquelle tout y passe, des morceaux de légendes comme Bohemian Rhapsody, Somebody To Love, We Are The Champions, Another One Bites The Dust jusqu’aux morceaux tardifs et peu ou pas joués en live comme I Want To Break Free, Under Pressure ou The Show Must Go On avec une prestation absolument exceptionnelle d’Adam Lambert. Le chanteur américain ne fait pas que réaliser un rêve, il le vit pleinement dans des interprétations inspirées, libérées, souvent drôles, et n’hésite pas à jouer avec le public qui en redemande. Il en fait des tonnes, mais comment chanter avec Queen sans être théâtral, voilà qui serait terriblement inconvenant !
Bien loin de l’image de vedettes vieillissantes et bedonnantes et marketant le souvenir de Freddie Mercury jusqu’à l’épuisement, ce live déborde d’énergie, de joie de vivre. 71 ans pour Roger Taylor et 73 pour Brian May, les deux ne font pourtant plus leur âge et Lambert s’occupe du reste. A l’image du visuel choisi, cette photo backstage où on imagine le trio s’avançant vers l’entrée de la scène, l’équipe apparaît soudée et heureuse. Il faut dire que depuis leur premier concert ensemble en 2012 le chanteur a su prouver sa valeur auprès de ses aînés mais aussi du public qui a appris à aimer ce garçon exubérant et doué qui aurait eu certainement tout pour plaire à Freddie Mercury lui-même.

La production – menée par le trio – restitue à merveille le grandiose et l’électricité ambiante d’un concert de Queen, le chanteur a du changer mais le groupe est resté le même.
Au final, à l’écoute, le fan va se trouver face à un choix : fera-t-il partie des pisse-froids qui mettront Adam Lambert plus bas que terre pour avoir osé perpétuer l’énergie et la maestria fantasque du charismatique ancien leader ? Ou va-t-il se prendre au jeu devant cette audace et cet enthousiasme et imaginer la résurrection d’une époque à défaut d’une personne ?