Dalès – Ecorces

Note : 4 sur 5.

Label : Araki Records

4/5

Créature musicale bicéphale partagée entre un guitariste, Enguerran Wimez, et un batteur, Joris Pesquer, Dalès propose une musique qui ne se veut voir enfermée ni dans le post rock, ni dans le jazz, ni dans le fourre-tout expérimental. Ce qui n’empêche pas bien sûr de trouver quelques racines par-ci par-là. Mais n’allez pas trop vite parler de pointillisme concernant ces deux-là, car tout vient de l’intention. Dalès ne veut pas jouer du post-rock ou du jazz ou quoi que ce soit en particulier, Dalès veut avant tout illustrer l’imaginaire, conter une histoire musicale. Dit autrement, le voyage vaut par lui même, pour le reste, venez comme vous êtes.

On comprend dès lors ce souci d’échapper aux nomenclatures, chaque auditeur recevant la musique en tant qu’individu va construire sa propre vision inspirée par le son. Contentons nous de dire que du post rock le duo a su extraire la force évocatrice, et du jazz une délicatesse, une sophistication mêlée d’élégance. Les circassiens d’Un Loup Pour L’Homme ne s’y étaient d’ailleurs pas trompés en 2020 en demandant au duo de travailler à l’habillage sonore de leur spectacle d’alors ; collaboration qui dure jusqu’à ce jour et dont les bandes sont disponibles sur le Bandcamp du groupe.

Mais revenons-en à notre album. Remarquable de fluidité musicale, Ecorces semble couler naturellement, presque comme si les morceaux n’avaient pas eu besoin d’être écrits et prenaient vie spontanément. Alors qu’il n’en est rien évidemment. Tout fourmille de détails, la texture sonore de la guitare, la résonance de la batterie, toutes les nuances sont savamment pensées puis ressenties. Entièrement instrumentales, les neuf compositions n’en ressortent que plus fouillées, permettant aux instruments de prendre toute leurs places sans jamais jouer les faire-valoir l’un pour l’autre. L’exceptionnelle complémentarité des deux musiciens se mesure aux accentuations, aux variations d’intensité. C’est frappant tout au long du disque, « Matamata » pouvant faire office d’apogée en la matière.

Citant des influences très pointues comme Shipping News, Do Make Say Think, Baden Powell ou encore Ahleuchatistas, nous avouerons que nous n’en avions que deux sur quatre. Pour citer une référence forcément un peu réductrice mais qui parlera à un plus grand nombre, une sorte de point de départ pour savoir un peu à quoi s’attendre, nous dirons qu’on retrouve mêlées dans les atmosphères très aérées des traces d’un Radiohead qui expérimente. 

Pour sublimer leur recherche musicale, les deux ont une fois de plus fait appel à Benoît Courribet, le troisième homme présent depuis les débuts et dont le CV d’explorateur de la matière sonore complète si bien la démarche des instrumentistes. Au final Ecorces offre un son naturel qui laisse l’auditeur libre de laisser aller son imagination à partir d’un matériau relativement dénué d’effets si ce n’est ceux des instruments eux-mêmes. Ici, pas d’artifice de production mais de l’authenticité.

Photo : Clara Masson

Enguerran Wimez et Joris Pesquer ont eu le souci permanent de mettre la quête musicale au centre de leur cheminement, laissant apparaître une indifférence profonde pour toute notion de mode ou de format qui force le respect. Ils continuent avec Ecorces de se forger une discographie d’avant garde et néanmoins accessible, un groupe qui inspire et qui a su gagner toute notre affection.

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